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Interview de Jean-Pierre Audoux, délégué général de la Fédération des Industries Ferroviaires : “notre filière a pris une dimension stratégique” (Ville Rail et Transports - 17/09/2013 - P. 51)

Ville, Rail & Transports : Peut-on évaluer l'impact du Nouveau Grand Paris en termes d'emplois pour l'industrie ferroviaire ?

Jean-Pierre Audoux : Nous avons regardé attentivement avec la Société du Grand Paris les grandes réalisations de lignes à venir et le calendrier. En termes de chiffre d'affaires, cela représente environ 600 millions d'euros annuels.

En termes d'heures de travail et d'emploi, nous estimons à 3 000 le nombre d'emplois fixes durables nécessaires chaque année, pour les infrastructures et autant pour le matériel roulant et la signalisation. Ces besoins vont s'échelonner sur une quinzaine d'années. Dans le domaine des infrastructures, la moitié des emplois concernera les travaux de pose de voies, l'autre moitié pour l'industrie « pure » (comme les rails, les traverses...).

Nous pensons également que l'effet Grand Paris constituera une très bonne vitrine pour l'exportation de notre savoir-faire dans l'urbain et le périurbain. Mais il est difficile de chiffrer les retombées potentielles.

Ville, Rail & Transports : Plus globalement, le marché intérieur français vous semble-t-il prometteur ?

Jean-Pierre Audoux : Jusqu'en 2011, voire 2012, nous avons connu un pic d'activité sur le marché français dans le secteur des matériels roulants même si les performances étaient moindres à l'exportation.

Pour les infrastructures, la situation était plus contrastée. Mais nous connaissons une montée en puissance de la rénovation des réseaux.

A ce constat plutôt positif, il faut mettre deux bémols. D'une part, la concurrence étrangère devient de plus en plus active sur le marché français et au-delà sur tous les marchés. D'autre part, malgré l'importance des investis sements annoncés, entre ce qui annoncé et ce qui est réalisé, il y a toujours une différence. On va sans doute assister à une stabilisation des effectifs de notre secteur sur le marché intérieur : après une forte hausse des recrutements dans nos entreprises, il pourrait y avoir un tassement car il arrive toujours des périodes de creux dans les livraisons. Cela devrait être le cas pour les matériels roulants. En revanche, l'activité liée aux infrastructures est appelée à rester soutenue.

Ville, Rail & Transports : Et à plus long terme ?

Jean-Pierre Audoux : Il faut distinguer le « court-moyen » terme, pour lequel après une année 2013 en net repli, l'horizon 2015-2016 s'annonce meilleur. Et pour le long terme - au-delà de 2018 - pour lequel nous ; sommes dans le noir. Pour le TER par exemple, nous sommes très loin des commandes annoncées : on parlait de 1 860 rames en 2009, un peu moins de 300 ont réellement été commandées.

Ne risque-t-on pas de se retrouver dans la même situation avec l'annonce du renouvellement des TET ? Une première tranche de 600 millions d'euros a été annoncée. Mais après ? Nous ne sommes pas capables d'anticiper sur dix ans, même si nous savons que les besoins sont considérables.

Des questions se posent aussi sur l'avenir de la grande vitesse en France. Nous ne savons pas vraiment ce qu'il adviendra de la filière grande vitesse après 2018. Il faut voir aussi comment le fret ferroviaire peut repartir. Cela fait beaucoup d'interrogations. Malgré cela, derrière ces annonces, on voit bien que notre filière a pris une dimension stratégique. Ce qui est tout de même rassurant.