Imprimer

Années terribles en vue pour l'industrie ferroviaire (La Lettre Confidentielle de Ville Rail & Transports - 27.07.2015)

Pour Louis Nègre, « le compte n’y est pas ». Au lendemain de la réunion du comité stratégique de filière ferroviaire présidé le 20 juillet à Bercy par Emmanuel Macron, le président de la Fédération des industries ferroviaires (FIF) se félicite de la volonté des pouvoirs publics d’« entretenir avec la filière une coopération approfondie ». Pour l’activité infrastructure, il se félicite aussi de la volonté de Jacques Rapoport, président de SNCF Réseau, « d’établir un partenariat élargi et durable » avec les industriels pour la mise en œuvre du Grand plan de modernisation du réseau. Mais, pour le matériel roulant, selon Louis Nègre « les réponses ne sont pas à la hauteur des défis à relever. » Aucune commande n’a d’ailleurs été annoncée à l’issue de cette réunion…

Deux périodes sont très sensibles et dépendent de décisions à prendre au plus vite : si aucune visibilité à moyen terme n’est donnée sur la filière, des bureaux d’étude ou ingénieries des constructeurs, comme des ingénieries indépendantes, pourraient être mises à mal très vite. Pour cette activité, la période délicate est imminente, ce sont les années 2016-2018. Deuxième période difficile et plus lourde socialement : la répercussion sur la production se ferait sentir au cours  des trois  années suivantes. Voire dès 2018.

En ce qui concerne les TET par exemple, les creux massifs des plans de charge des « sites industriels concernés vont se produire dès 2018 ». Reichshoffen (Alstom) et Crespin (Bombardier) seraient ces sites industriels, concernés, précisons-le, en cas de recours aux contrats-cadres TER passés avec Alstom et Bombardier. Ce recours aux Régiolis et Regio 2N est  clairement l’hypothèse privilégiée par Emmanuel Macron, selon des participants à la réunion. C’est aussi pour l’immédiat celle de la FIF. Car, l’urgence absolue est de sauver l’emploi dans les sites existants. Mais le rythme envisagé par l’Etat n’est pas rassurant. Selon des indications données par Alain Vidalies, une livraison de nouveaux TET pourrait intervenir à l’horizon 2025, soit, « de facto un début de production à partir de 2020 ». C’est tard pour les industriels, mais le secrétaire d’Etat aux transports ne s’engage pas trop, précise la FIF,  « en raison des incertitudes juridiques liées à une hypothèse de contrats cadres » qui, rappelons-le, n’ont pas été faits pour cela.

Afin d’empêcher « une catastrophe industrielle et humaine », la FIF formule à nouveau ses  propositions : écrêter une partie de la  charge 2015-2016 en la transférant sur 2016-2017, lever en priorité des options sur les contrats ouverts (Regio 2N, Régiolis et NAT), ce qui soulage Bombardier et Alstom,  mais ne fait le bonheur ni de Siemens, ni de CAF et de son usine de Bagnères-de-Bigorre.

La FIF demande que soit accéléré le traitement de l’appel d’offres RER 2N NG, destiné d’abord à Eole. Après bien des déboires, un troisième appel d’offres a été lancé en avril, et l’on attend les réponses pour la fin de l’année. L’accélérer, certes… mais on ne peut pas aller plus vite que la ligne. Or celle-ci est attendue, pour la partie centrale en tunnel en 2020 si tout va bien… Et, aléa classique de ces projets, le démarrage de travaux de déviation de réseaux porte Maillot s’annonce délicat. Bref, pour le matériel, il ne faut pas tarder, mais cela ne sert à rien non plus de se  précipiter.

Il faut aussi, selon les industriels, démarrer dès 2017 l’industrialisation du nouveau TGV. Guillaume Pepy, lors de la réunion du comité stratégique de filière, a assuré qu’il n’y aurait pas d’interruption de production. Déclaration appréciée. Mais l’incertitude reste très forte sur le rythme de production des toutes prochaines années.

Reste tout de même le secteur urbain qui, lui, avec les commandes de métro déjà passées par la RATP, comme avec la perspective du métro du Grand Paris Express, n’est pas menacé.


FD